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Date : 27-10-2025 11:14:31
Budget 2026 : découvrez ces amendements bâillons qui veulent « punir » les associations et ONG qui « ne se tiendraient pas sages »
Alors que le budget prévoit un milliard d’euros de coupes dans le financement des associations, des amendements déposés par l’extrême droite et la droite visent à restreindre encore les subsides d’ONG dont l’action n’a pas l’heur de plaire au pouvoir.
Publié le 26 octobre 2025
Eugénie Barbezat
À chaque débat budgétaire, les associations sont des cibles privilégiées : un secteur atomisé, avec peu de capacité à mobiliser et à la merci de financements publics réductibles à loisir. Mais comme l’ont affirmé haut et fort à l’unisson les acteurs du secteur le 11 octobre dernier : ça ne tient plus ! Un message qui ne semble pas avoir été entendu puisque le budget en discussion est particulièrement maltraitant pour les associations.
En plus de la coupe d’environ un milliard dans leurs subsides publics, le budget prévoit de « punir » les structures qui « ne se tiendraient pas sages » en décourageant leur financement privé. Un amendement (n° I-282) déposé par le RN en particulier marque une escalade sans précédent : il propose de retirer la défiscalisation des dons à toute association condamnée, quel qu’en soit le motif.
Les associations de défense des animaux et de l’environnement ciblées
Les amendements n°I-365 (LR) , n°I-573 (RN et UDR), n°I-2365 (Horizons) et n°I-2608 (LR) ciblent quant à eux directement les organisations environnementales et de protection animale qui documentent les conséquences de l’industrialisation de l’agriculture. Ils prévoient d’élargir la liste des infractions pouvant entraîner la perte de la défiscalisation pour leurs donateurs, y incluant la captation d’images sans autorisation, l’intrusion, l’occupation de terrain, la destruction de biens ou encore la diffamation.
« Nos enquêtes ont révélé les souffrances inacceptables que subissent les animaux dans les élevages et les abattoirs. Ces images ont contribué à faire évoluer la législation et posent dans le débat public l’urgence de revoir notre modèle agricole et alimentaire. Ces amendements visent à faire taire ceux qui témoignent et empêchent les avancées indispensables pour répondre aux urgences éthiques, environnementales et de santé publique », explique Brigitte Gothière, cofondatrice et directrice de L214, ciblée par les amendements n°I-365, n°I-2608, n°I-370, n°I-828 qui criminalisent la documentation des pratiques dans les abattoirs et les élevages.
Concernant les installations nucléaires, un autre amendement (n° I-826) du RN vise les actions d’intrusion : sans élargir la liste des infractions existantes, il prévoit de retirer la défiscalisation aux associations impliquées, au motif que la relance du nucléaire en France amènerait à « une recrudescence de ce type d’actions ».
« Ces amendements cherchent à punir l’action citoyenne et à faire taire la critique. En décidant quelles associations seraient « acceptables » ou non, les parlementaires s’arrogent le droit de trier les ONG selon leur convenance politique. C’est inacceptable dans une démocratie : les associations défendent l’intérêt général, là où l’État échoue trop souvent à agir », s’insurge Apolline Cagnat, responsable juridique de Greenpeace France.
« Cette criminalisation de l’action associative »
La liste des « amendements-bâillons » ne s’arrête pas là. D’autres (n°I-280, n°I-37, n°I-281, n°I-923, n°I-1174) déposés par le RN et LR s’attaquent aux associations humanitaires et d’aide aux personnes exilées. Ils ne reposent pas sur un élargissement d’infractions, mais sur une exclusion directe du dispositif de réduction d’impôt pour les dons faits à toute organisation condamnée pour le très discutable délit « d’aide au séjour à des personnes en situation irrégulière ».
Autrement dit, alors que les premiers amendements étendent le champ des fautes susceptibles de faire perdre la défiscalisation, celui-ci supprime purement et simplement le bénéfice fiscal pour les donateurs des ONG agissant en faveur des personnes migrantes. Pour Nathalie Tehio, présidente de la Ligue des droits de l’Homme, « la contribution publique au financement des associations, dans leur diversité y compris politique, est un pilier de la démocratie. La voir remise en cause désormais chaque année pendant l’examen du budget, est une pression inacceptable sur leur fonctionnement et le projet associatif qu’elles choisissent de se donner, soutenues par les cotisations et les dons des particuliers. »
Plusieurs organisations dont Canopée, France Nature Environnement, Greenpeace France, L214, la Ligue des droits de l’Homme, et les Amis de la Terre France dénoncent dans un communiqué commun « cette criminalisation de l’action associative » et appellent les parlementaires à « rejeter ces vagues d’amendements qui cherchent à museler financièrement des contre-pouvoirs citoyens et à affaiblir la démocratie ».
https://www.humanite.fr/social-et-economie/associations/budget-2026-decouvrez-ces-amendements-baillons-qui-veulent-punir-les-associations-et-ong-qui-ne-se-tiendraient-pas-sages
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